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jeudi 7 avril 2011

Réflexions sur les orientations de l'élevage du griffon korthals

Dr Pierre DEBRET

La sélection par consanguinité ne se fait-elle pas au détriment de la résistance ?

Il est vrai que plus une lignée est consanguine moins les individus sont résistants au niveau immunitaire par exemple, avec aussi assez souvent des portées moins nombreuses. C’est la raison pour laquelle il est important pour notre race d’avoir des lignées différentes et assez indépendantes, en croisant de temps en temps ces lignées, on apporte un patrimoine génétique différent et on redonne alors de la vigueur aux individus produits, c’est le phénomène d’hétérosis bien connu des généticiens. En conclusion, avec la consanguinité, on fixe les caractères mais il faut être raisonnable et sortir de sa lignée de temps en temps en allant chercher un étalon d’une lignée différente. Par contre, il est complètement interdit chez les griffons korthals d’aller retremper avec une race étrangère ce dont nous n’avons nul besoin étant donnée la richesse de notre cheptel.

Que répondez-vous à ceux qui pensent que les chiens de concours sont des
chiens de cirque ?


Que fait de plus un chien de concours qu’un chien de chasse de base ? Il présente une quête régulière, son arrêt est très ferme, il est sage à l’envol et va chercher à l’ordre en donnant assis à la main. Est-ce vraiment si artificiel ? J e ne le pense franchement pas car nombre de chiens réalisent ces actions de façon spontanée après quelques années d’expérience, ils le font alors par souci d’efficacité pour la quête et l’arrêt ou tout simplement pour faire plaisir à leur maître en ce qui concerne le rapport. Pour le chien de concours, ce qui est difficile, c’est la formation accélérée (puisqu’ils sont en compétition à 2ans) et la perfection de l’exécution et c’est là que l’action du dresseur est primordiale. Pour ce qui est des allures et de la puissance de nez, de la façon de prendre l’arrêt, c’est uniquement une question d’instinct et là, le chien de chasse et le chien de concours sont sur ces points à égalité.

Qu’ont de plus les chiens de concours ?

Quand j’observe des jeunes korthals qui viennent dans les TAN, je trouve que nous avons une chance énorme. Les chiens qui souvent n’ont vu que l’environnement de leur maître, mis en présence de gibier d’élevage, déclenchent pour la plupart des réflexes de chien de chasse : l’arrêt puis la poursuite du gibier. Une grande majorité va rapporter d’instinct après quelques jours de chasse et s’élancer à l’eau si une pièce est tombée dans une mare. Rares sont les korthals qui oublient leur maître à la chasse, la majorité est tellement proche de leur propriétaire qu’elle va toujours chasser dans un rayon d’efficacité raisonnable. Le chasseur de base est donc comblé et s’il veut participer à des chasses en groupe, il lui faudra par contre ajouter un zeste de discipline pour ne pas gêner les voisins. Pour décider qu’un jeune chien peut entamer une carrière de chien de concours, il faut que celui-ci ait en plus une passion énorme, ce sera son moteur. Cette passion lui permettra de supporter le dressage car, même avec un peu de contrainte, il repartira toujours pour essayer de trouver un nouveau gibier et pour ainsi assimiler plus vite son dressage. Vous comprenez aisément que ces chiens vont apporter énormément à la race puisque la passion est aussi très importante pour le chien de chasse de base.

Quand je fréquente les territoires de chasse et que j’observe les auxiliaires de certains de mes voisins, je m’aperçois qu’il existe des chiens de chasse qui auraient pu faire une belle carrière de field-trial. C’est donc parfois pour les meilleurs éléments le conditionnement par le maître qui va faire la différence. On essaie par exemple de ne pas chasser le lapin avec un futur champion, ainsi il sera moins tenté de nasiller et prendra plus facilement les émanations de gibier à plumes avec le nez haut. On va essayer également de le faire chasser sur un laps de temps réduit afin qu’il reste concentré. C’est cette faculté de concentration qui va lui permettre pendant le concours de ne faire aucune faute et de gagner.
Ce sera grâce à ces bonnes habitudes acquises, à cette faculté de concentration, mais aussi grâce à un dressage approprié et sans faille que le chien va pouvoir exprimer ses qualités de nez et d’intelligence sur le gibier.

Existe-t-il vraiment un décalage entre les chiens de concours et de chasse pratique ?

Je puis vous dire que les griffons korthals de concours sont des auxiliaires de chasse exceptionnels. Il suffit de contempler le palmarès des concours sur bécasses qui n’ont rien d’artificiel pour prouver que nos chiens primés sur faisans sont d’une grande efficacité sur gibier naturel. Dans ce type de concours, la passion est primordiale et l’instinct de trouveur indispensable. 2009 fut un cru exceptionnel puisque les huit premiers chiens au classement de la clochette sont des griffons korthals et cette année, cinq sur les neuf premiers sont de nouveau des barbus.

La course vers l’élite et la vitesse ne se fait-elle pas aux dépens de l’efficacité ?

Pour nos griffons korthals, la course vers la vitesse n’est pas recherchée. Bien entendu, l’allure en concours est le galop mais ce galop ne doit être ni trop rapide ni trop nerveux. Par contre, la course vers l’élitisme en suivant le standard de travail ne peut faire que progresser la race. En concours, c’est quand même en partie l’efficacité qui est récompensée et on ne peut quand même pas accuser l’élite d’être trop efficace. Il faut cependant rester vigilant à ce que nos chiens gardent leur rusticité légendaire qui leur permet d’aller à l’eau, d’explorer les terrains broussailleux, marécageux et autres. Tout ceci se juge à la chasse et c’est donc bien la preuve qu’une partie de la sélection s’effectue aussi par les éleveurs sur les terrains de chasse.

Comment passer de 20 minutes de concours à 7 heures de chasse ?

Comme je vous le disais précédemment, c’est un problème de conditionnement et de métabolisme. Quand on emmène un chien sortant des field-trials à la chasse, il va régler de lui-même son effort sur la journée. Ceci ne m’a jamais posé de problème avec mes korthals.

La recherche de l’excellence n’est-elle pas à terme un risque pour la race ?

Une race de chien de chasse comme le korthals est un ensemble, elle est identifiée par son standard qui décrit des points précis (par exemple la texture du poil). Ces points doivent être respectés pour que le sujet puisse valider ses résultats en concours. Ceci est primordial si l’on veut garder l’identité de chaque race, nos juges de standard ont donc ici une grande importance. Pour progresser dans la race, Korthals utilisait déjà la consanguinité qui permet de fixer les caractères, et la sélection qui permet d’éliminer de la reproduction les sujets hors-type ou présentant des défauts, cette sélection rigoureuse devant également s’effectuer sur les terrains de chasse ou de concours.

Pour conclure, je pense que nous avons un cheptel tout à fait intéressant pour le chasseur de base (des chiens “arrêteurs“ et rapportant facilement), une classe de chiens de concours de bon niveau qu’il faut maintenir dans le type car ce seront les reproducteurs de choix pour améliorer les performances des plus modestes.
Si la tendance aujourd’hui est de mettre l’accent sur le respect du type, ce qui est tout à fait normal, je dirai que demain il faudra surveiller le maintien de la rusticité et du caractère tranquille qui caractérise notre griffon.
Comme vous le voyez, notre Club qui travaille beaucoup sur la qualité du cheptel, doit maintenir son effort pour que le griffon korthals reste au plus haut niveau des concours de field-trial mais aussi et surtout pour qu’il reste l’auxiliaire préféré des chasseurs.

Pierre Debret
Vice-Président du Club Français du Griffon d’arrêt à Poil Dur Korthals

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